Don online

Sclérose en plaques: un cocktail explosif

La sclérose en plaques (SEP) est un coktail explosif qui implique le virus Epstein-Barr (EBV), l’auto-immunité, la neuro-inflammation et l’atrophie cérébrale.

La SEP est une maladie chronique affectant environ 13.000 Belges, responsable de lésions inflammatoires multiples et diffuses dans le cerveau et la moelle épinière. Ses causes exactes restent inconnues mais impliquent à la fois des éléments génétiques de susceptibilité et des facteurs de l’environnement. Parmi ceux-ci, l’infection par le virus Epstein-Barr (EBV) est considérée de plus en plus comme une condition nécessaire au développement de la maladie. La SEP pourrait en effet être une complication très rare et tardive d’une infection par EBV chez des personnes génétiquement susceptibles.

 

L’infection par EBV survient généralement dans l’enfance entre 1,5 et 9 ans et est le plus souvent asymptomatique. Lorsque qu’elle a lieu dans l’adolescence, elle peut provoquer une mononucléose infectieuse caractérisée par de la fièvre, une angine, une hypertrophie des ganglions et une grande fatigue. Les personnes présentant une mononucléose infectieuse ont trois fois plus de risque de développer plus tard une SEP. Le virus persiste durant la vie entière dans les lymphocytes B. Environ 95 % des individus adultes ont des anticorps anti-EBV alors que c’est quasiment 100 % des patients atteints de SEP (1046/1047 dans une étude de 2015, 901/901 dans une étude de 2020).
Une étude épidémiologique a été réalisée entre 1993 et 2013 sur 62 millions d’échantillons sanguins prélevés tous les deux ans chez 10 millions de jeunes adultes travaillant dans les forces militaires américaines. 5,3 % des individus étaient négatifs pour les anticorps anti-EBV lors de la première analyse sanguine. Une sclérose en plaques a été détectée chez 955 personnes durant cette période, et 35 d’entre elles n’avaient pas d’anticorps anti-EBV dans leur premier échantillon sanguin. Ces 35 personnes ont développé une SEP toujours après, et jamais avant, d’avoir été infectées par le virus EBV et d’avoir fabriqué des anticorps spécifiques. Le risque de développer une SEP était dès lors multiplié par 32 par comparaison avec les personnes toujours restées séronégatives. On a pu aussi calculer que la SEP débutait entre 2,5 et 15 ans après l’apparition des anticorps anti-EBV (délai moyen de 7,5 ans).
Nous ne connaissons pas encore les mécanismes précis par lesquels le virus EBV, devenu latent dans les lymphocytes B, désorganise le système immunitaire et provoque une auto-immunité contre des antigènes de la myéline, la gaine protectrice des fibres nerveuses.
 

Cette gaine de myéline est une super-membrane permettant la conduction ultra-rapide de l’influx nerveux. La destruction de ces gaines de myéline se fait en plaques bien circonscrites aussi bien dans le cerveau que dans la moelle épinière. L’influx nerveux y est fortement ralenti ou même bloqué. La fibre nerveuse dépourvue de cette protection peut dégénérer, entrainant une atrophie globale du cerveau. La remyélinisation de ces lésions est donc d’une importance cruciale pour rétablir les fonctions neurologiques altérées.

 
La présence de « plaques fantômes » (ou « shadow plaques ») est une source d’espoir.
Il s’agit de lésions où la remyélinisation a été spontanée grâce aux capacités intrinsèques de réparation du cerveau. Ces nouvelles gaines de myéline restent cependant plus fines que normalement mais permettent à nouveau un transfert de l’influx nerveux proche de la normale. Hélas, cette remyélinisation est très variable d’une personne à l’autre et même d’un endroit du cerveau à l’autre. Elle est absente dans les plaques très anciennes ou situées par exemple dans le cervelet. Nous ignorons actuellement pourquoi ce phénomène spontané est si variable en fréquence, en intensité et en localisation. Cependant la possibilité même d’une remyélinisation dans un cerveau adulte encourage les nombreuses recherches réalisées dans ce domaine. Ces études ont pour but de rechercher les facteurs inhibant la remyélinisation et les moyens potentiels de stimuler les cellules synthétisant la gaine de myéline, à savoir les oligodendrocytes et leurs précurseurs. 
 

La moitié des recherches financées actuellement par la Fondation Charcot se concentrent sur l’étude de ce processus de remyélinisation. 

Professeur Christian Sindic, Président

19.06.23

Aidez-nous Faites un don ou un legs