Tout savoir sur la sclérose en plaques

Gérer l’annonce du diagnostic
Un diagnostic précoce est capital. Mais il faut un diagnostic solidement établi, respectant les critères de diagnostic internationaux. Ce diagnostic n’est pas toujours facile comme on peut s’en rendre compte avec la longue liste des diagnostics différentiels à envisager puis à exclure méthodiquement. « Je vous dirai tout (tout ce que je sais), mais laissez-moi le temps de collecter toutes les données nécessaires ».
Révéler le diagnostic est une évidence, mais pas n’importe comment, n’importe où, au téléphone par exemple, ni sans explications détaillées. L’entrée dans la maladie et l’annonce du diagnostic brisent la flèche du temps, il y aura un avant et un après, et tout le but d’une médecine humaine sera d’aider la personne impliquée à accomplir l’effort d’un rebondissement. Il ne s’agira pas de garder une juste distance mais une juste proximité avec cette personne, au-delà des éléments objectifs de la maladie, en tenant compte de sa personnalité, de ses projets, de ses aspirations, de son environnement social et affectif. Ceci est vrai pour le médecin traitant, le neurologue, les autres médecins spécialistes, l’ensemble du personnel paramédical.
Bien sûr, l’annonce du diagnostic peut entraîner une détresse psychologique réactionnelle. Mais elle peut aussi provoquer un soulagement dans la mesure où l’on peut mettre des mots sur des symptômes et des ressentis, lever une incertitude, définir une voie à suivre.
Au moment même de l’annonce du diagnostic, il faut définir avec la personne concernée les éléments statistiques de bon pronostic et de moins bon pronostic qui lui sont propres, afin de choisir le traitement le plus adéquat.
Sont des éléments de bon pronostic le fait de commencer la maladie avant l’âge de 40 ans (et encore mieux avant 30 ans), d’être de sexe féminin (la maladie est moins fréquente chez l’homme mais plus handicapante), d’avoir un taux sanguin de vitamine D normal, d’être non-fumeur, de ne pas souffrir d’une autre maladie associée (hypertension artérielle, obésité, troubles psychiatriques).
Les formes rémittentes ont un meilleur pronostic que les formes d’emblée progressive, et une fréquence faible des poussées durant les deux premières années (aucune ou une au maximum) indique une maladie moins agressive. Par contre, un intervalle de moins de 6 mois entre la poussée initiale et la deuxième poussée est un facteur défavorable. Une récupération complète d’une poussée est aussi le signal d’une maladie moins handicapante. Une échelle EDSS inférieure ou égale à 2 (sur base de l’examen neurologique clinique au moment du diagnostic) est un élément de bon pronostic.
Si les symptômes initiaux ne sont PAS dus à une lésion dans le cervelet, le tronc cérébral ou la moëlle épinière, et si ces symptômes ne sont provoqués que par une seule lésion, le pronostic en sera meilleur. Par contre, il est plus réservé en cas de troubles cognitifs (mémoire, orientation, concentration, planification).
Les images IRM sont aussi importantes dans l’établissement du pronostic. Si au moment du diagnostic on n’observe que 1 à 4 lésions sans lésion prenant le produit de contraste, sans lésion dans le cervelet, le tronc cérébral ou la moëlle épinière, sans lésion nécrosante appelée « black hole », le pronostic sera meilleur que dans les situations inverses. L’absence de bandes oligoclonales dans le LCR sera de meilleur pronostic, de même qu’une épaisseur normale de la couche de fibres nerveuses de la rétine mesurée par « Optical Coherence tomography ».
Sur base de l’ensemble de ces données, on pourra décider
- Soit (rarement) de ne pas traiter, par exemple en cas de souhait d’une grossesse imminente, ou de surseoir provisoirement un traitement éventuel en contrôlant l’évolution de la maladie par une IRM réalisée 4 à 6 mois plus tard
- Soit d’entamer un traitement immunomodulateur de première ligne ou de « moyenne efficacité », qui peut parfaitement suffire pour la personne concernée, mais qui peut faire l’objet d’une escalade thérapeutique si des indices cliniques ou radiologiques montrent une activité persistante de la maladie.
- Soit d’initier d’emblée un traitement de seconde ligne dit « de haute « efficacité », en établissant toujours une balance bénéfice/risques, nécessaire pour empêcher une atrophie cérébrale progressive et irréversible. Quand la maladie est inactivée et stabilisée, on peut retourner vers un traitement de moyenne efficacité ou un suivi clinique et radiologique rigoureux afin de détecter la moindre reprise d’une inflammation intra-cérébrale.
Il reste donc bien des incertitudes quant aux meilleurs choix thérapeutiques à l’échelle individuelle. Mais il faudra toujours essayer d’arriver à une décision médicale partagée : « je vous dirai tout ce que je sais, je vous aiderai à définir vos préférences et ce dont vous ne voulez absolument pas, et je vous dirai aussi le traitement qui me paraît le plus indiqué pour vous. Mais la décision finale vous revient et je vous aiderai à sa mise en pratique ». Ne pas imposer un traitement, ne pas faire de l’intrusion médicale. Après le transfert de connaissances, nous parlons d’égal à égal.
Cette décision médicale partagée est l’idéal à atteindre. Elle n’est pas toujours possible en cas de déni de la maladie ou d’une difficulté d’en appréhender les graves conséquences potentielles. Il faudra parfois se montrer directif tout en essayant de convaincre !
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